Mécène du festival "Sibérie inconnue" à Lyon, Irina Prokhorova fait rayonner la culture russe contemporaine. Rencontre à Krasnoïarsk.

C'est une grande et belle femme au sourire magnifique, avec un côté frais qui peut surprendre quand on la sait mère d'une fille de 27 ans. Tailleur-pantalon noir, blouse de popeline blanche fermée au col par une simple broche, bottines aux talons solides, il émane d'elle une force assez rare. Son nom? Irina Prokhorova. Soeur aînée de Mikhaïl Prokhorov, 45 ans, trente-neuvième fortune mondiale et deuxième de Russie selon le classement du magazine Forbes, elle est un personnage capital de la vie culturelle russe.

Curieux binôme! À lui, les affaires, les nanotechnologies, les voitures hybrides, l'or, le bâtiment, récemment l'achat de l'équipe de basket-ball du New Jersey (les Nets) et la chronique mondaine, à elle, la culture sous toutes ses formes. Quoique... Ensemble, en 2004, ils ont créé la Fondation Mikhaïl Prokhorov – privée et à but caritatif –, qui soutient la culture russe et facilite sa diffusion dans le monde. Point d'ancrage, Krasnoïarsk et sa région, la plus vaste de Sibérie. Ils y ont fondé en 2007 un festival du livre qui remporte un franc succès (30.000 visiteurs l'an passé). Surtout, pour nous Français, ils sont les mécènes, dans le cadre de l'année France-Russie, du festival Sibérie inconnue qui fera découvrir, jusqu'au 21 novembre à Lyon, la création russe contemporaine, mais aussi l'"invention" de la Sibérie à partir du XVIIIe siècle. ...

Le lendemain matin, 5.000 personnes, la plupart des moins de 25 ans devant les stands (180 éditeurs, et tous russes). Expositions (dessins de Günter Grass, entre autres), animations (une performance du Liquid Theatre). Un peintre contemporain réputé pour ses provocations, Dmitri Tsvetkov, initie des enfants au dessin et à la peinture. Il est venu là "par pure sympathie pour Irina". Conversation avec Evgueni Mironov, acteur star en Russie qui joue dans Les récits de Choukchine, une production du Théâtre des Nations de Moscou qu'il dirige (à voir aussi à Lyon). Il raconte comment il a expliqué à Medvedev que le théâtre est un élément structurant pour une ville même petite: il attire le business, des constructions d'hôtels, de routes, etc. Son objectif? Changer le regard des Russes sur leurs provinces. ...