SOLEIL TROMPEUR 2: MIKHALKOV REVIENT À CANNES AVEC UN HYMNE À L'AMOUR

Sandra Lacut
05.21.2010
lepoint.fr

Seize ans après Soleil trompeur, Grand prix du jury au Festival de Cannes et Oscar du meilleur film étranger en 1994, le Russe Nikita Mikhalkov revient sur la Croisette avec le deuxième volet de cette saga familiale, Soleil trompeur 2: l'exode, un hymne à l'amour sur fond de Deuxième Guerre mondiale.

Présenté samedi dans la soirée en séance de gala, le film, taxé par certains médias de "pro-stalinien", débute par une scène où le héros écrase la tête de Staline dans un gâteau à la crème.

La guerre entre Russes et Allemands est le théâtre d'une histoire intime dans laquelle le stalinisme et ses méthodes de manipulation et de destruction de l'individu sont tournées en dérision et démontées avec un art de la distanciation hérité des grands écrivains russes.

"Mon film n'est ni pro, ni anti-Staline. Ca n'a aucun sens d'en parler dans ces termes. C'est une histoire d'amour entre un père et une fille nourris par cet amour et par leur foi", s'est défendu le réalisateur, interrogé en conférence de presse. "J'ai des points de vue et je les exprime, c'est mon droit. C'est la base de la démocratie au sens le plus large", a-t-il ajouté.

Le réalisateur des Yeux noirs (1987) et du Barbier de Sibérie (1999), tous deux présentés à Cannes, a expliqué avoir voulu traiter dans ce film de la "métaphysique de la destruction", ce qu'il réussit parfaitement en jouant avec l'humour noir et l'absurde. Réagissant à une question sur des réalisateurs ayant quitté l'Union des cinéastes russes qu'il préside en signe de protestation contre son "autoritarisme", Nikita Mikhalkov a déclaré: "30 d'entre eux n'en ont jamais fait partie, deux autres n'habitent plus en Russie, et 30 n'ont pas versé leur cotisation depuis cinq ou dix ans, ce qui devrait leur valoir une exclusion. Pour ceux qui restent, seuls quatre ont vraiment quitté l'Union", qui compte 5.000 membres.

L'histoire du général Kotov et de sa fille Nadia, interprétés par le réalisateur et, comme dans Soleil trompeur 1, par sa propre fille Nadejda, tourne autour du lien indéfectible qui les unit et se situe entre 1941 et 1943. Kotov s'échappe miraculeusement d'un camp où il est détenu. Considéré comme mort par l'armée, il se retrouve simple soldat dans un bataillon sur le front.

Ni lui, ni Nadia, devenue infirmière, ne sait si l'autre est en vie mais l'amour qu'ils se portent et la foi en la vie qui les unit vont leur permettre de traverser la guerre en échappant à la mort.

Le film dure deux heures et demie et s'achève par l'annonce d'un troisième volet, Citadelle, dont la sortie est prévue au printemps prochain. Un triptyque que le réalisateur dit ne "pas du tout" avoir prévu au départ et qui est né de sa "volonté de présenter sa propre vision de cette guerre", en contrepoint à celle de l'Américain Steven Spielberg dans Il faut sauver le soldat Ryan (1998), axé sur le débarquement allié. Le tournage des deux dernières parties a duré huit ans et coûté 40 millions de dollars, a détaillé Nikita Mikhalkov devant la presse.

Répondant à ses détracteurs qui l'accusent également d'avoir bénéficié de largesses du pouvoir actuel en Russie pour financer son oeuvre, le réalisateur a expliqué que l'Etat russe ne pouvait abonder qu'à hauteur d'un million de dollars par film et que tout le reste venait de "d'investisseurs privés, sponsors et amis qui (lui) font confiance".