SOLEIL TROMPEUR 2: QUEL PENSUM INDIGESTE!

Thierry Chèze
05.22.2010
lexpress.fr

Nikita Mikhalkov donne une suite à son Soleil trompeur, Grand Prix du Jury cannois en 1994. Une fresque de 2h30 et de 35 millions d'euros aux semelles de plomb. Le pire film de la compétition.

L'HISTOIRE:
Serguei Kotov, héros de la révolution bolchévique, a été condamné au goulag par le régime de Staline qui le considère comme un ennemi du peuple. Mais l'invasion de l'URSS par les Nazis le 22 juin 1941 lui permet de s'échapper. Mais pourra t'il survivre dans son pays en plein chaos meurtrier ?

LES PLUS: Quelques plans de Soleil trompeur glissés ça et là qui rappellent le talent poétique de l'homme des Yeux noirs. Et l'arrivée du générique mettant fin au calvaire.

LES MOINS: Les plaisanteries les plus courtes sont les meilleures. Voilà un dicton sur lequel aurait du méditer Mikhalkov avant d'exposer au plus grand nombre cette fresque lourdingue, bruyante et mortellement ennuyeuse de 2h30. Le Russe multiplie travellings, gros plans, explosions, musique symphonique... mais met tous ces outils du cinéma au service du néant. Il n'est ni Leone, si Spielberg, ni Lelouch: ni lyrique, ni spectaculaire, ni romanesque. On a l'impression de voir un gamin engloutir dans un déluge d'effets pyrotechniques le trésor de 35 millions d'euros qu'on lui a confié ou plutôt qu'il s'est lui- même confié, en tant que membre éminent du conseil d'administration de l'agence fédérale chargée de subventionner le cinéma russe. Chacun de ses plans fait 30 secondes de trop, aucun de ses mouvements de caméra ne raconte quelque chose. Son intrigue aux semelles de plomb se vit dans la salle comme une chemin de croix interminable dans lequel il prend cependant garde de faire brailler chacun de ses comédiens pour maintenir le public éveillé. La symphonie promise tourne au concert épuisant de grosses caisses sans harmonie. Comment un cinéaste russe peut il à ce point caricaturer l'âme russe ? That's the question...

VERDICT: La centaine de cinéastes russes (dont Sokourov et Guerman) qui ont démissionné récemment de l'Union des Cinéastes Russes pour protester contre l'aspect cinéaste officiel du régime de Mikhalkov avaient doublement raison. Premièrement parce que Soleil trompeur 2 a siphonné 80% des investissements de l'Etat dans la production cinématographique. Deuxièmement parce qu'en signant une pétition au titre de "On ne l'aime pas", il résume notre avis du matin. Hélas pour nous, un panneau indiquant "fin de la première partie s'affiche à la fin du film". Il y aura donc un Soleil trompeur 3! Une demande solennelle s'impose. Venise s'est sacrifié pour accueillir 12 hommes en colère, l'avant- dernier film de Mikhalkov, Cannes pour celui-ci. Alors, s'il vous plaît, messieurs les sélectionneurs de la Berlinale, c'est à votre tour maintenant d'accueillir celui qui est devenu hélas le spécialiste du septième art boursouflé.